Lausanne, le 14.3.19
MODIFICATION DE LA LOI SUR LE SERVICE CIVIL
Nous entendons que l’armée manque de bras et de cerveaux et qu’il y a une fuite des appelés vers le service civil. Nous voyons le Conseil fédéral introduire, pour contrer ce mouvement, des mesures propres à décourager les candidats au service civil de façon à maintenir un effectif suffisant pour l’armée. Nous sommes affligés de constater un retour en arrière concernant l’admission au service civil sous prétexte de garantir la sécurité du pays. Nous aimerions une meilleure compréhension de l’utilité du service civil pour l’intégration dans la société et la responsabilisation des jeunes par l’engagement dans les mouvements sociaux. Nous demandons un libre passage de l’institution armée à l’institution civile et son ouverture notamment aux femmes.
Nous reconnaissons le souci d’harmoniser le rythme des périodes de service civil avec le rythme annuel des périodes d’instruction militaire et le besoin de la preuve par l’acte. Les mesures envisagées nous paraissent cependant introduire des sanctions qui péjorent l’équilibre souhaité. Cette modification introduit des sanctions incompatibles avec le droit international qui demande aux États de s’abstenir de punir les objecteurs de conscience par des mesures disproportionnées et discriminatoires par rapport aux militaires.
Les objecteurs ne sont, sauf exception, plus punis de prison, ils ont obtenu le droit de faire un service civil. Ce service est même plus long que le service militaire comme si le service militaire était la norme et qu’il fallait faire la preuve par l’acte de sa motivation pour y échapper. Maintenant le Conseil fédéral introduit des sanctions en plus de la preuve par l’acte: si la demande n’est pas déposée trois mois à l’avance, elle n’empêche pas l’entrée en école de recrue, si elle est faite pendant l’école de recrue alors l’admission est repoussée d’une année, s’il reste moins de 100 jours de service militaire à effectuer le civiliste devra assumer au moins 150 jours de service civil, la période longue doit se faire dans l’année qui suit la décision d’admission, etc… Ces mesures de dissuasion sont des sanctions inacceptables car le candidat devra subir le service d’instruction militaire jusqu’à ce que la décision d’admission lui soit notifiée.
Il n’y a pas une norme militaire et des écarts par rapport à la norme qui doivent être sanctionnés, mais deux façons de servir son pays. Une façon, par l’apprentissage, de la soumission aux ordres et comment imposer des contraintes, une autre façon par l’apprentissage de la responsabilité et l’engagement solidaire. Nous ne pouvons qu’espérer que le service civil attirera de plus en plus de candidats. Est-ce un danger pour l’armée? Elle peut soigner son instruction pour la rendre plus attirante et les techniques modernes lui permettent de se passer du grand nombre de personnes en activité.
Pour le CENAC
Éric Voruz et Luc Recordon, membres du comité et anciens parlementaires fédéraux