Dans un essai passionnant, l’ingénieure et philosophe des sciences Sabine Rabourdin revisite le rapport de l’Homme occidental avec la Nature et appelle à une refondation de celui-ci
Dans « Les sociétés traditionnelles au secours des sociétés modernes » (Delachaux & Niestlé, 2005), Sabine Rabourdin s’interrogeait sur la capacité des sociétés « primitives » à répondre aux questions a priori insolubles posées par la confrontation entre « modernité » et écologie. Elle en concluait que les sociétés modernes avaient beaucoup à apprendre de la manière dont les sociétés traditionnelles fixaient des limites à l’exploitation de leur environnement. En outre, elle constatait une étonnante unité de vue parmi la grande diversité des peuples indigènes.
Dans ce nouvel opus, l’auteure examine de près la relation Homme / Nature et plus particulièrement les raisons qui ont conduit les peuples occidentaux à une rupture avec la Nature.
Le passage du statut de chasseur-cueilleur à celui d’éleveur-cultivateur a conduit l’Homme à la sortie du Jardin d’Eden. Si les modernes considèrent ce passage comme une libération, il peut aussi être vu comme la fin du paradis terrestre : l’Homme prend ses distances avec la Nature, il agit sur la Nature, il la manipule en choisissant de reproduire certaines plantes et de domestiquer certains animaux.
Cette séparation va s’accentuer au fil des siècles. La révolution scientifique et la montée en puissance de la mathématisation de la Nature va achever la séparation Homme / Nature en Occident. La Nature est un vaste réservoir de ressources que l’Homme est appelé à exploiter et à domestiquer. A l’opposé, « le point commun aux traditions indigènes est une conscience du rapport intégral et entier de la vie symbolique avec la vie quotidienne, de l’ordre de la nature avec l’ordre social. » (p. 111)
Michel-Maxime Egger rappelait dans Terres Civiles no 54 (mars 2012) que « le capitalisme n’est pas seulement extérieur à nous. Il vit également en nous, souvent à notre insu. » Il ajoutait : « Ces ressorts de l’homo œconomicus et du système capitaliste qui les instrumentalise sont au cœur de l’exploitation de la nature. »
S’agissant de la science, Sabine Rabourdin relève la distorsion grandissante entre une perception « grand public » d’une science capable de répondre aux défis posés par les limites de la nature elle-même et l’état de la science aujourd’hui : « la forte propension [de la science] à se définir comme seule forme de connaissance légitime fait figure d’intégrisme alors que, loin de mettre à jour des certitudes, ses propres découvertes ont fait émerger tant d’incertitudes sur le réel. » (p. 180)
Signe des temps, la montée de nouvelles tendances – comme par exemple celle de la décroissance – appelle à un changement collectif et individuel vis-à-vis de la Nature. Comme le rappelait Gandhi, « il y a assez de tout dans le monde pour satisfaire aux besoins de l’homme, mais pas assez pour assouvir son avidité ».
Replanter les consciences : une refondation de la relation homme-nature / Sabine Rabourdin ; [préf. de Vandana Shiva]. – Gap : Yves Michel, 2012. – 245 p. : ill. ; 22 cm. – (Société civile)
Cote CENAC 301.31 RAB
Sur le même sujet, voir également :
- La Terre comme soi-même : repères pour une écospiritualité / Michel Maxime Egger ; préf. de Pierre Rabhi. – Genève : Labor et Fides, 2012. – VII, 321 p. ; 23 cm. – (Fondations écologiques)
Cote CENAC 301.31 EGG - L’Homme entre Terre et Ciel : nature, écologie et spiritualité / Jean-Marie Pelt, Pierre Rabhi, Nicolas Hulot, Edward Goldsmith, Roland de Miller, Aigle Bleu, Yvan Amar ; préf. d’Alain Chevillat. – St Julien-en-Genevois : Jouvence, 2007 . – 155 p. ; 18 cm. – (Les Forums Terre du Ciel)
Cote CENAC 301.31 HOM - Les noces avec la terre: la mutation du nouvel âge / Roland de Miller. – L’Isle sur la Sorgue : Scriba, 1982 . – 304 p. : fig. ; 24 cm
Cote CENAC 301.31 MIL - Nature mon amour: écologie et spiritualité / Roland de Miller . – Paris : Debard, 1980 . – 333 p. : fig. ; 24 cm
Cote CENAC 301.31 MIL